Mouche asiatique des fruits - Drosophila suzukii - Traitements bio

La mouche suzukii, une petite drosophile destructrice de fruits rouges

Identifier et connaître la biologie de la mouche asiatique des fruits

Morphologie

La mouche asiatique du cerisier est un Diptère (famille d’insectes appelés communément mouches), et plus particulièrement une drosophile. 

Les drosophiles passent par 4 stades de développement :

• L’œuf : il est blanc , relativement petit (0,5 mm de long) et de forme ovale. Les œufs sont pourvus de 2 petits tubes respiratoire (appelé aéropyles) qui leur permet de  respirer lorsqu’ils sont dans la chair des fruits.
• L’asticot : il s’agit d’un petit ver blanc dépourvu de pattes et de forme allongée. Il passe par 3 stades larvaires et atteint 3 à 5 mm de long à la fin de sa croissance.
• La pupe : il s’agit du stade intermédiaire entre l’asticot et la mouche adulte. Elle est de couleur brune à rougeâtre et ressemble à une petite capsule. Elle mesure 2 à 3 mm de long.
• L’adulte : il s’agit d’un petit moucheron qui ne dépasse pas les 3 mm de long. Il possède des yeux rouges et un corps orangé (caractère morphologique très commun chez les drosophiles). Pour les distinguer des autres espèces, il faut observer l’extrémité des ailes. Chez les mâles, elles arborent une petite tâche sombre à chaque extrémité. Les femelles quant à elles, sont pourvues d’un ovipositeur pointu et dentelé à l’extrémité de leur abdomen. Il lui permet de perforer la peau des fruits pour y déposer ses œufs.

Les tâches sur les ailes des mâles et l’ovipositeur pointu en forme de scie est un critère fiable pour les distinguer des autres espèces. Mais il faut être équipé d’une bonne loupe !

Biologie

Ce sont les femelles fécondées qui passent l’hiver dans le sol, dans le bois ou les bosquets bien exposés en attendant la montée des températures. On peut noter que les adultes hivernants ont une longévité accrue et présentent une coloration plus foncée qui leur permet de se réchauffer plus vite au printemps.

Lorsque la belle saison arrive, elles partent en quête de nourriture (nectar de fleur, miellat, exsudats sucrés). Et dès l’apparition des premiers fruits printaniers, elles vont débuter la ponte !

Contrairement aux autres espèces de drosophiles françaises qui s’attaquent au fruits abîmés ou pourris, la drosophile suzukii pond ses œufs dans les fruits mûrs et sains. Elle privilégie les petits fruits rouges, à la peau fine. Les fraises, les cerises et les framboises sont très prisées ! Pour pondre, la mouche japonaise utilise son ovipositeur en forme de scie pour faire une petite incision dans la peau du fruit, puis elle y dépose ses œufs. Une femelle pond généralement 1 à 3 œufs par piqûre et occasionne plusieurs piqûres par fruit. Elles sont très fécondes avec au total 20 à 420 œufs au cours de leur vie.

A une température de 22°C, les œufs mettent un à 2 jours avant d’éclore. Il en sort des petit asticots blancs qui vont directement commencer à se nourrir. Ils s’attaquent à la zone superficielle des fruits, en consommant leur chair. 6 jours plus tard, les larves ont fini leur croissance et elles quittent le fruit pour rejoindre le sol et se transformer en pupe. Un adulte émergera 6 jours plus tard et débutera sa ponte peu de temps après.

A 22°C, il faut donc au total 14 jours pour passer de l’œuf a l’adulte. A 15°C : 25 jours et à 25°C : 8 jours. Cette rapidité de développement et cette fécondité est caractéristique des drosophiles et les rend particulièrement prolifiques ! On peut observer jusqu’à 10 générations par an !

D’où vient la mouche suzukii ? 

Elle a été décrite pour la première fois au Japon en 1931, ce qui lui a valu le nom de mouche japonaise des fruits. La première introduction accidentelle a été faite a Hawaï en 1980. Puis c’est en 2008 qu’elle rejoint les côtes américaines.

En Europe, c’est en 2008 qu’elle est repérée. L’Italie et l’Espagne sont les premiers touchés. Puis vient la France en 2009, dans l’Est et le Sud Est. Aujourd’hui, c’est essentiellement la moitié Sud de la France qui est impactée par ce ravageur ainsi que les vignobles alsaciens.

Les fruits sensibles aux drosophiles asiatiques 

La mouche suzukii a une préférence marquée pour les petites baies à peaux fines, nous vous avons listés les plus sensibles :

• Framboises
• Myrtilles
• Mûres
• Fraises
• Cerises
• Prunes
• Raisins

Elle peut occasionnellement être rencontrée sur tomates, pêches, abricots, pommes et figues. Elle privilégie les variétés à peaux fines. Les groseilles et cassis ne semblent pas être sensible, mais il convient d’être vigilent !

Certaines plantes sauvages sont également des hôtes de la mouche asiatique, on peut citer par exemple les baies de sureau, les baies du yèble et les mûres.

En Europe, c’est au total plus de 126 espèces de plantes sauvages et cultivées dont les fruits peuvent être attaqués par ces asticots…

Les symptômes et les dégâts occasionnés par Drosophila suzukii

Cette petite drosophile est devenue le principal ravageur des petits fruits en France, les dégâts sont considérables :

Les dégâts indirects provoqués par les moucherons

En pondant, la mouche asiatique perfore la peau des fruits avec son ovipositeur. Elle insère ainsi plusieurs œufs à l’intérieur du fruit.

La piqûre occasionnée forme une petite plaie qui est une porte d’entrée pour les champignons et bactéries responsables du pourrissement des fruits. La zone ramollit et se dégrade rapidement.

Les dégâts directs provoqués par les asticots

En se développant, les asticots se nourrissent de la chair du fruit. La zone atteinte pourrit rapidement… Les fruits sont invendables et impropres à la consommation. Il a parfois été dénombré plus de 40 larves par fraise !

Il est fréquent que l’intégralité d’une récolte soit totalement détruite si rien n’est fait.

Risque de confusion avec d’autres vers des fruits

D’autres insectes pondent leurs œufs dans les fruits et peuvent être confondus avec la mouche asiatique des fruits. Nous vous avons listé les confusions les plus fréquentes et les critères pour éviter de se tromper. En effet, les traitements ne sont pas les mêmes !

Savoir différencier la mouche européenne de la cerise et la mouche asiatique du cerisier

C’est sûrement la confusion la plus fréquente. La mouche européenne de la cerise, Rhagoletis cerasi, est très commune et s’observe sur la quasi totalité des cerisiers. Pour les distinguer :

• La mouche de la cerise parasite uniquement les cerises, ce qui n’est pas le cas de Drosophlia suzukii.
• La mouche de la cerise est beaucoup plus grande que la suzukii (6 mm de long contre 3 mm de long). Il  en est de même pour l’asticot.
• Le nombre de larves par cerise : la mouche de la cerise ne pond qu’un seul œuf par fruit, il y aura donc une seule piqûre et un seul asticot. Contrairement à la mouche suzukii qui pond plusieurs œufs dans chaque fruit. Voir la photo ci-dessus.
• La mouche de la cerise pond ses œufs dans les fruits encore vert, on observe alors une piqûre avant le mûrissement et qui a tendance à cicatriser. La mouche asiatique quant à elle pond ses œufs dans le fruit mûr… ces derniers pourrissent sur l’arbre rapidement.
• L’asticot de la mouche européenne de la cerise se développe dans la chair du fruit située autour du noyaux. Les dégâts sont caractéristiques à l’ouverture de la cerise. Contrairement aux asticots de la mouche asiatique qui se développent juste sous la peau.

Vous retrouverez plus d’informations sur la mouche de la cerise dans cet article.

On peut noter que les 2 ravageurs peuvent être présent sur un même arbre.

Savoir différencier la mouche méditerranéenne des fruits et la mouche asiatique du cerisier

• La différence se fait essentiellement sur la mouche adulte et la taille des asticots. Ils sont beaucoup plus gros dans le cas de la mouche méditerranéenne. 
• La mouche  méditerranéenne s’attaque surtout aux pêches, agrumes, abricots, figues… Plus rarement sur cerises et fraises.  A l’inverse de la mouche asiatique.
• La mouche méditerranéenne est uniquement présente sur le bassin méditerranéen, ce qui réduit les risques de confusion.

Savoir différencier le ver de la framboise de la mouche suzukii

Le ver de la framboise, Byturus tomentosus, est un insecte bien différent de notre drosophile. Celui ci est un coléoptère (petit scarabée) et ne ressemble en rien à une mouche.  Pour les différencier :

• Les dégâts sont très différents, on observe l’apparition de fruits malformés ou avortés.
• Les adultes sont de petits scrabées qui se nourrissent des fleurs et des bourgeons des framboisiers.
• Une larve par framboise avec une tête bien visible, un corps allongé et jaunâtre avec des segments bruns,  contrairement aux asticots de la mouche japonaise. Voir la photo ci-dessous.

Savoir différencier les drosophiles des fruits (mouche du vinaigre) de la mouche asiatique des fruits

Attention, lorsque les fruits sont abîmés, d’autres petites drosophiles peuvent venir pondre à l’intérieur. Il s’agit de mouche du vinaigre, Drosophila melanogaster, qui se nourrit de la pourriture. Elle ne pond jamais dans les fruits frais. La confusion est très fréquente car il est difficile de distinguer les espèces entre elles. Le mieux est d’observer les mouches à la loupe. Les mâles de la mouche asiatique présentent des tâches noirs au bout de leurs ailes alors que la mouche du vinaigre n’en ont pas.

Comment se débarrasser de la mouche asiatique des fruits ?

Il est possible de réduire considérablement les infestations de mouches asiatiques des fruits rouges, mais il convient d’adopter une lutte globale qui repose sur plusieurs axes :

Les bonnes pratiques pour limiter le développement des mouches asiatiques

Appelé également prophylaxie, ces bonnes pratiques culturales ont un impact significatif sur les drosophiles asiatiques :

• Récoltez les fruits mûrs le plus souvent que possible : les mouches asiatiques pondent leurs œufs dans les fruits prêt à être ramassés. En les récoltant, elles ne trouveront plus de lieu de ponte. Pour les fraises et les framboises, il est recommandé de faire au minimum 2 récoltes par semaine durant la pleine période.

• Ramassez les fruits trop mûrs ou les fruits tombés au sol : ils constituent un réservoir pour le développement de la drosophile. Jetez les à la poubelle et non au compost.
• Réduisez l’humidité de la culture : la mouche asiatique aime les environnements humides. N’hésitez pas à « aérer » la culture en taillant les plantes sensibles, en éliminant les branches ou les feuilles mortes et en réduisant l’arrosage le plus possible.

La plantation de variété résistantes 

Si vous avez des infestations récurrentes rendant les récoltes impossibles ou bien en prévention. Vous pouvez planter des variétés moins sensibles aux attaques de mouches asiatiques :

Privilégiez les variétés à peau épaisse ou de couleur blanche qui seraient plus résistantes. Mais cela n’a pas encore été prouvé.

Les filets anti insectes

Les filets anti insectes (toiles insect-proof) dont la maille est inférieure à 1 mm donnent de bons mais présentent un inconvénients majeurs : ils empêchent les insectes pollinisateurs de féconder les fleurs. Le résultat : une baisse de la production… Pour contourner cela, installez-les à la fin de la floraison, juste avant que les premiers fruits ne commencent à mûrir.

Les pièges à mouche suzukii

Le piégeage des mouches suzukii permet de détecter la présence du ravageur dans son jardin et d’agir en conséquence. Il réduit également le nombre de mouches si on multiplie le nombre de pièges.

Ce piège est à compléter avec l’emploi d’un attractif alimentaire ou d’une phéromone spécifique.

Il est à installer dans le feuillage, à proximité des fruits. Des relevés hebdomadaires sont nécessaires pour ne pas passer à côté des premiers vols. Lorsque les mouches sont détectées, vous pouvez commencer à utiliser des produits répulsifs ou des traitements bio.

Les répulsifs naturels

La pulvérisation de produits répulsifs naturels tels que la macération huileuse d’ail dissuaderait la mouche asiatique de venir pondre sur les fruits. Il convient de faire des pulvérisation toutes les semaines en période à risque.

Des pulvérisations de purin de tanaisie semble également intéressantes.

Les traitements biologiques

Il n’existe pas de traitements miraculeux pour lutter efficacement contre Drosophila suzukii. Néanmoins, en cas de capture dans le piège spécifique, nous vous recommandons de pulvériser une solution à base de talc. Ce dernier va recouvrir le fruit une pellicule blanche, ce qui va rendre  sa détection difficile par la mouche asiatique.

Ce produit naturel est à renouveler à chaque épisode pluvieux et durant toute la période à risque

L’utilisation d’insectes auxiliaires parasites de mouche suzukii

A ce jour, il existe un auxiliaire commercialisé en France pour lutter contre la mouche asiatique :Trichopria drosophilae. Il s’agit d’une micro guêpe, à peine visible à l’œil nu et qui parasite les pupes de drosophiles. Cet auxiliaire sans danger pour l’homme et l’environnement donne de bons résultats mais plusieurs lâchers et un habitat varié sont nécessaires pour une bonne implantation dans la culture.

Favorisez les prédateurs naturels de la mouche asiatique

D’autres parasites de drosophiles sont naturellement présents en France, c’est le cas de Pachycrepoideus vindemmiae qui s’attaquent aux pupes ou bien le genre Leptopilina et Asobara qui s’attaque aux larves.  Afin de favorisez leur habitat, pensez à implanter des mélanges fleuris ou laissez une zone en jachère à proximité immédiate de la culture à protéger. Ces fleurs apporteront  du pollen et du nectar, indispensables à leur survie. 

D’autres organismes non spécialisés peuvent s’attaquer aux drosophiles japonaises, c’est le cas des araignées, des staphylins … mais également de petits organismes vivants dans le sol : des acariens prédateurs ou des nématodes. Un sol en bonne santé est indispensable au maintien de cette petite faune du sol. Pensez à apporter de la matière organique sous forme de paillage et ne travaillez pas le sol .

Les insecticides biologiques ou chimiques pour lutter contre la mouche asiatique des fruits : une mauvaise idée !

Il n’existe pas de traitement efficace contre la mouche asiatique des fruits. Des insecticides chimiques sont utilisés sur les fraises mais ils ne protègent la culture que sur une très courte période (une semaine), par contre, ils détruisent l’intégralité de la faune auxiliaire. Lorsqu’ils sont utilisés, on constate la recrudescence d’autres ravageurs tels que les thrips ou les acariens.

De plus, la forte prolificité de cette drosophile et son cycle de développement rapide sont favorables à l’apparition de résistances aux pesticides chimiques.

Les insecticides biologiques tels que le spinosad ne montrent pas de meilleurs résultats.

Un autre fait important : la mouche asiatique pond ses œufs dans les fruits qui commencent à mûrir ou sur le point d’être ramassés. L’emploi d’insecticides chimiques est donc interdit car il convient de respecter un délai entre le traitement et la récolte. Les résidus de pesticides dans les fruits seraient trop importants.

La lutte biologique avec des répulsifs, des produits naturels, des pièges et  des insectes auxiliaires tels que des guêpes parasitoïdes prend alors tout son sens !